Martin Barzilai est un jeune photographe, né en 1971 à Montevideo, en Uruguay. Rencontré récemment, il m’a fait découvrir à travers l’un de ses travaux photographiques, la vie des Maîtrisards en Tunisie. Des portraits forts, illustrant un fléau de ce pays : le chômage.
Qui sont ces personnes que tu as photographiées ?
Ce sont des diplômés chômeurs laissés sur la touche par le système Ben Ali. Quand je les rencontre, à la mi-mars 2011, une quarantaine d’entre eux campent devant le ministère de l’éducation. Les uns réclament un poste de professeur, les autres un poste d’instituteur. Certains sont fraîchement diplômés, d’autres le sont parfois depuis plus de quinze ans et possèdent une maîtrise ou un CAPES (Certificat d’Aptitude au Professorat de l’Enseignement Secondaire), tous sont au chômage, vivent de boulots occasionnels et de l’aide de leurs familles. Ils protestent également contre un système de corruption bien huilé qui continue à fonctionner pour l’attribution des postes, malgré la chute de Ben Ali. Aucun fonctionnaire ne veut les recevoir.

Arari Talbi, 30 ans, maitrise de mathematique obtenue en 2005, travaille occasionnellement comme photographe © Martin Barzilai

Kouki Najoua, âgée de 33 ans, maîtrise et master d’histoire contemporaine obtenu en 2005. Elle a fait des stages entre autre à la BNF a Paris. Mais pour survivre, elle a travaillé à l’usine et comme babysitter © Martin Barzilai
Pourquoi traiter ce sujet ?
Il m’a semblé qu’il était représentatif de la problématique tunisienne à ce moment-là : comment changer un système quand les bureaucraties restent en place et continuent selon leurs habitudes à appliquer la corruption? L’attitude de ces personnes à la fois combatives et désespérées par leur situation m’a également semblé représentative et intéressante dans la mesure où je n’avais pas vu de reportage qui leur était entièrement consacré.

Najoua Mouelhi, professeur de francais, ne peut plus exerceer depuis 2003, date à laquelle sa note d’inspection a été falsifiée.© Martin Barzilai
Quels sujets aimes-tu photographier ?
Pour moi, la photographie est seulement un outil pour parler d’une problématique. Ce qui m’interesse finalement c’est d’avantage les questions que peuvent soulever une série de photographies que l’acte de photographier. En d’autres termes, les sujets que je photographie le plus sont liés à l’humain. Si l’acte photographique est solitaire, c’est tout de même la rencontre avec l’autre et la compréhention de ce qu’il vit qui est le plus intéressant dans cette démarche. Quand on fait, je crois, une bonne photographie, on ne peut pas dire qu’on a aimé la faire. On l’a faite parce qu’il fallait le faire parce que d’une certaine façon on y est forcé, pour montrer une réalité.

Mathlouthi Hayet, 32 ans, maîtrise en comptabilité obtenue en 2004, originaire de Ben Arous, elle a été travailleuse agricole pour survivre entre autres petits boulots © Martin Barzilai

Nejib Mbarki, 33 ans, maîtrise en informatique obtenue en 2003, originaire de Kerouan © Martin Barzilai

Mustapha Mnafgui, 33 ans, maîtrise de mathématique, au chômage depuis 2004, originaire de Sidi Bouzid © Martin Marzilai

Azri That, âgé de 37 ans, maîtrise de langue et de lettres francaise obtenue en 2004 © Martin Barzilai

Dalila Bel Hadj Salem, 37 ans, maîtrise en langue arabe obtenue en 2003, originaire de zaghouan © Martin Barzilai

Fathi Tozem Sghaier, 47 ans, maîtrise de théologie spécialisé en croyance et philosophie obtenue en 1990. Il fait six mois de prison en 1993 pour raison politique et n’a pas pu exercer depuis © Martin Barzilai

Ouda Hamraoui, 26 ans, maîtrise en langue italienne obtenue en 2008, originaire de Hammam-Lif © Martin Barzilai
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Propos recueillis par Margaux Duquesne
g. duq.
9 juin 2011
tres beau et tres emouvant ce reportage de portraits.