Né en 1964 en Belgique, Laurent Van der Stockt a couvert les conflits d’Irak, d’ex-Yougoslavie, d’Afghanistan, de Tchétchénie… Il débute dans le milieu de la photographie, à l’âge de 14 ans : il travaille alors dans un laboratoire photo, « bien avant de penser à faire du journalisme ». En 1990, il intègre l’agence Gamma. Aujourd’hui, il est un photojournaliste largement reconnu par ses pairs. Rencontre à travers les ondes…
Je n’aime pas faire d’interview par téléphone. Mais parfois, nous n’avons pas le choix. Je souhaitais faire la rencontre de Laurent Van der Stockt, alors qu’il présentait son exposition IN IRAQ, au Petit Endroit, à Paris. Comme il était à New York, nous avons réalisé cet entretien par téléphone.
Ses images ont été réalisées en Irak, entre 2003 et 2005.
« L’Irak, maintenant, je n’y retourne plus. Il y a trop d’inimitié de la part des habitants, trop de problèmes de sécurité… Se promener avec un appareil photo, en Irak, est devenu dangereux. Alors on vole des images, on sort peu. On ne peut pas construire un récit correctement (…) En Yougoslavie, les gens comprenaient l’importance de la présence des journalistes. Ils comprenaient que ce métier était important. Aujourd’hui, en Irak, au Pakistan le seul fait d’être un étranger est déjà un risque en lui-même. »
Un travail de fond
« En 1991, un an après être entré dans une agence, j’ai eu un accident en Yougoslavie. J’ai reçu un éclat d’obus dans le bras. J’ai été immobilisé pendant deux ans. J’ai eu le temps de réfléchir. J’ai compris que je m’étais éloigné de mon objectif premier. J’avais adopté de mauvaises manières pour rapporter un évènement. Il fallait que je prenne plus de temps pour faire mon travail, pour faire un travail qui reste. »
Voici un extrait de son travail sur la guerre en Tchétchénie, réalisé de 1995 à 1999 :
Photographier les enfants dans la guerre
« Les enfants sont un sujet qu’il faut manier avec plus de prudence et de pudeur que d’habitude, car c’est un sujet qui touche l’émotionnel des gens. Et une photographie « émotionnelle » est toujours dangereuse. Beaucoup de journaux en utilisent, parce que c’est « attendrissant ». Quand ils utilisent mes photos d’enfants sur un mode larmoyant et émotif, j’ai l’impression de voler quelque chose et d’être volé par les médias. »
Autocensure
« C’était en Somalie, lors des grandes campagnes de distribution de riz. Mais le riz n’arrivait pas là-bas ! Un pick-up de 15 sacs de riz est arrivé, au milieu d’une vingtaine de photographes. Je me suis senti incapable de faire cette photo. Ils ne distribuaient pas de nourriture. On a une responsabilité personnelle. Si on sait que ce n’est pas vrai, on ne doit pas participer à la diffusion de ces images. J’ai juste fait une photo de la masse de photographes. »
Propos recueillis par Margaux Duquesne
Posted on 13 décembre 2011
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